Le rapport de la Cour des Comptes publié le 23 juin sur le financement de l’alternance, dont le titre du rapport est éloquent (“Une voie en plein essor, un financement à définir”), et celui du Sénat, enregistré à la présidence du Sénat le 29 juin et qui traite également de l’alternance (pointant aussi le CPF et les autres dispositifs), soulignent tous les deux le déficit structurel de cet organisme créé avec la Loi Avenir Professionnel et émettent des recommandations à différents niveaux.
La réforme de 2018 a modifié le paysage de la formation avec la libéralisation du marché de l’apprentissage, la création d’une place de marché pour le CPF, la modification des rôles et missions des acteurs de la formation (régions, branches et OPCA devenus OPCO), modification de certains dispositifs de financement (transformation du CIF en PTP)…
Autant de modifications qui pèsent aujourd’hui sur le déséquilibre financier que connaît France Compétences, qui pourrait atteindre 5,9 milliards d’euros pour 2022.
En premier lieu, c’est le dispositif de l’alternance qui est pointé du doigt, car même si cette libéralisation crée un marché concurrentiel qui propose davantage d’offres en apprentissage, ce dispositif qui totalise en 2021 732 000 contrats d’apprentissage aura nécessité un budget de 5,8 milliards d’euros.
L’analyse des comptabilités analytiques des CFA observe un écart d’environ 20% entre les charges des CFA et le Niveau moyen de Prise En Charge (NPEC), sujet régulièrement débattu entre les branches et France Compétences qui émet des préconisations. Cela fait l’objet des recommandations de la Cour des Comptes pour une baisse des NPEC.
A ce jour les aides à l’apprentissage sont renouvelées jusqu’à fin 2022, mais les recommandations émises vont dans le sens de la suppression des aides de l’Etat, et de nombreux questionnements sont aujourd’hui d’actualité pour soutenir l’apprentissage, que cela soit par une réforme de la taxe d’apprentissage, ou bien encore vers une réforme qui intéresserait l’Education nationale.
Olivier Dussopt, Ministre du Travail, déclarait le 30 juin dernier qu’une première baisse des NPEC de l’ordre de 5% interviendrait au 1er septembre 2022. Une seconde baisse dont le montant sera fonction de l’analyse des comptabilités analytiques des CFA interviendrait au 1er avril 2023.
Ces décisions ont été votées par une majorité des membres du conseil d’administration de France Compétences.
Le Ministre expliquant que les aides de l’Etat, alors que la France est dans une phase de sortie de crise, ne peuvent se poursuivre dans les mêmes proportions. Il convient de discuter avec les partenaires sociaux des prochaines mesures qui permettront de développer l’alternance et d’atteindre le million d’apprentis.
En second lieu, le CPF est lui aussi mis en avant avec une enveloppe de 2,7 milliards d’euros en 2021. Dans ses recommandations, la Cour des Comptes suggère de recentrer sur des certifications qui répondent aux besoins du marché de l’emploi.
Aussi, les formations en langues et en bureautique sortiraient du cadre de financement du CPF, axe de réflexion qui nous est confirmé lors de notre participation à la Commission Certification organisée par les Acteurs de la compétence le 28 juin dernier. De la même façon, Laurent Durain, directeur de la formation professionnelle et des compétences à la CDC, nous confirmait que de nombreux contrôles continuaient de s’opérer sur les titulaires d’une offre de formation pour les créateurs et repreneurs d’entreprises, et que très prochainement des contrôles s’opéreront sur les dispensateurs de bilan de compétences, ces deux actions étant également dans le viseur de la Cour des Comptes.